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Empreintes à l'encre mauve
7 mars 2016

Des milliers, vingt et cent...

Rails2Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent.
Dans des trains à bestiaux, dans des wagons plombés.
Les vaches et les hommes les regardaient passer,
Avec intérêt pour les premières au milieu des prés
Avec indifférence pour les autres au sein de leur confort
Les autres ? Vous, moi, eux, pères et mères de famille,
Bons citoyens français, allemands, polonais, silencieux.

Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent.
Ils partirent en cendres et aussi en fumée.
Il fallut éloigner des villes leur dernière demeure :
Le bourgeois était incommodé par les odeurs.
La peau quand elle brûle, et les cheveux aussi,
Ça vous prend à la gorge, ça pique un peu les yeux.
Et puis la graisse humaine ça encrasse les vitres.

Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent.
On les parqua alors au beau milieu de champs
On brûla tant et plus les roses, jaunes, bruns, rouges
Sous la houlette folle d’un homme, peintre raté
Regard halluciné et brûlé d’ambition, avide de pouvoir
Ils étaient homo, tsigane, communiste, juif, prostituée
Handicapé physique ou bien mental, jeune ou vieux.

Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent.
Et lui était tout seul. Mais qu’eût-il fait tout seul
Pour anéantir tant d’hommes ? La crise et le chômage,
L’un après l’autre entra dans son discours de haine,
Dénonçant, haïssant tous les boucs émissaires
Désignés par le guide, le führer et son verbe de sang
Ils le suivirent tous, moutons incapables de penser.

Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent.
Un peuple se leva pour préserver la race,
Celle qu’il disait pure, qu’il disait la meilleure
Pour préserver l’espace, retrouver la croissance
Quelques uns essayèrent de démontrer l’absurde.
On les fit taire aussi pour préserver l’union
Nationale retrouvée. Et l’on dormit en paix.

Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent.
Quelques années plus tard, les yeux se dessillèrent.
Trop tard. Innocences brûlées. Sommet d’absurdité.
Ils étaient morts pour rien dans d’infâmes bûchers.
On se dit «  plus jamais », on décida l’Europe, la paix.
On signa des traités, on reprit le commerce,
On célébra très fort l’amitié entre peuples

Ils sont des milliers, ils sont vingt et cent.
Aux portes de l’Europe, tout près des barbelés
Ils sont aussi parqués à Calais ou ailleurs.
Ils ont faim, ils ont froid, les femmes sont enceintes
C’est la crise. Encore. Ils dérangent. Où qu’ils soient.
On les voudrait ailleurs. On voudrait les nier.
On voudrait retrouver notre confort d'avant.

Ils sont des milliers, ils sont vingt et cent.
J’ai honte de la boue où ils s’entassent peureux.
J’ai honte de cette vie qu’on les condamne à vivre.
J’ai honte d’un système qui fabrique l’horreur.
Je pleure sur l’orphelin, sur la femme qui pleure.
Pourquoi tant de savoirs si ce n’est pour l’humain
Pourquoi tant de richesses si ce n’est pour la vie.

Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent.

Ils sont des milliers, ils sont vingt et cent.

On oublie bien trop vite les horreurs de l’histoire.

 

MC Mars 2016

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