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Empreintes à l'encre mauve
10 novembre 2015

Les clés, suite et fin

Pour la dernière fois, la truite leur parla et leur dit : « il faut remonter le ruisseau jusqu’à sa source, là, vous trouverez une grotte. Vous vous faufilerez sur un des côtés, et marcherez quelques temps le long d’un boyau qui descend assez abruptement dans la terre. Au fond du boyau, s’ouvrira une salle immense. C’est là qu’est le minerai de piairessakré. Vous prélèverez la quantité exacte que le forgeron vous a prescrite. Vous chargerez vos sacs sur vos dos. Et vous pourrez repartir. N’oubliez pas de garder une pincée à la main pour honorer le gardien de la montagne. Adieu maintenant. »

Ils se remirent en route, malgré le manque de sommeil : ils étaient pressés d’en finir avec cette dernière exigence du forgeron, pressés d’apprendre à forger leurs six clés, pressés de rentrer au pays.
Ils marchèrent des heures, accompagnés de curieuses présences lumineuses qui semblaient veiller sur eux.

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Ils trouvèrent en effet la grotte.

S5031776Et y pénétrèrent avec prudence et impatience. Les murs de l'entrée étaient sertis de pierres précieuses, des émeraudes, des améthystes, des grenats. Une douce lueur les illuminait. Elles lançaient leurs feux colorés. Cétait merveille.

S5031790Mais la découverte de la grande salle fut un moment de ravissement que seuls pourront comprendre ceux qui sont déjà allés chercher du minerai de piairessakré. Ils remplirent leurs sacs et repartirent, les yeux tout émerveillés du spectacle contemplé.
La remontée fut rude. Le chemin était escarpé.
Arrivés à l’air libre, il leur restait encore des dizaines de kilomètres à parcourir.
Autour d’eux, le paysage était métamorphosé.

L'automne avait peint de couleurs chamarrées les feuilles des arbres.

DSC08484

Ils eurent du mal à se repérer tant les lieux avaient changé d’aspect. Ils comprirent que le temps de la grotte n’était pas le même que le temps du dehors. D’ailleurs, en se regardant plus attentivement, ils lurent sur les visages les uns des autres, une gravité nouvelle, une densité de présence. Et puis surtout, leurs yeux avaient un drôle d’éclat. Comme si une lumière dansait à l’intérieur. Lumière dont ils auraient juré les uns et les autres qu’elle n’était pas présente au début de leur périple.

regard

Le froid était tout de même très vif et les sacs étaient lourds. La tentation de les laisser sur place traversa certains esprits. Cela faisait si longtemps qu’ils ne s’étaient ni restaurés solidement, ni reposés vraiment. Ils cherchaient comment rendre la redescente plus facile, portant deux sacs à la fois pour alléger, l’espace d’un instant, le compagnon harassé. Mais le soulagement était de courte durée.
Arrivés au bas de la montagne, ils déposèrent leur obole au pied du gardien du seuil.
Ils virent alors un arc en ciel se déployer.

S5034329Ils surent que le but du chemin leur était montré. Ce fut un soulagement.
De courte durée: leurs jambes étaient lourdes, leurs pieds endoloris, leurs muscles tétanisés par les prémices de l'hiver. Ils s’assirent quelques instants, adossés contre un monticule rond, en bordure du chemin.

DSC02623Comme ils se lamentaient, épuisés de fatigue, se demandant comment ils allaient parcourir encore autant de distance, le monticule se mit à bouger.
Ils se levèrent de frayeur, pensant que la terre s’animait.
Le monticule s’ébroua, grogna. C’était l’ours. Oui, l’ours qu’ils avaient délivré du piège. Il avait entendu leur conversation et compris leur désarroi. Et malgré le fait que, dès que s'installe l'automne, les ours ont coutume de s'adonner à des siestes de plus en plus longues, il leur proposa de porter leurs sept sacs jusque chez le forgeron, afin de les remercier de leur générosité passée. Ils acceptèrent avec tant d’enthousiasme que l’ours en oublia définitivement son envie de dormir ! Ils parcoururent allégrement la distance qui les séparait du village du forgeron. L’ours les y laissa en leur souhaitant bonne chance.

Le forgeron savait précisément quand ils allaient arriver. Il avait préparé un banquet réjouissant de mille saveurs et mille couleurs.

S5035078Il avait invité les sorcières de chacun des villages des sept compagnons qui n’eurent aucun mal, juchées sur leurs balais, à se rendre au festin des retrouvailles.
Plus rien ne pouvait surprendre maintenant les sept aventuriers : ils avaient rencontré des pierres qui parlent, été aidés par des animaux de l’air, de l’eau et de la terre, vu d’étranges présences lumineuses, ils avaient pénétré dans la grotte magique du minerai de piairessakré, la présence des sept sorcières au banquet du forgeron leur parut naturelle. En tout cas, ils ne posèrent pas de questions et se régalèrent du délicieux repas, arrosé d'une boisson enivrante....

DSC02814Ils allèrent ensuite dans leur chambre et dormirent une semaine entière sans discontinuer.

Au matin du huitième jour, ils se réveillèrent et se rendirent à la forge. Leurs sacs étaient là. Le forgeron expliqua à chacun comment forger ses six clés, à partir du minerai de piairessakré. Ils écoutaient avec beaucoup d’attention. Et ils se mirent à l’œuvre.

DSC00807Regardant les flammes de la forge, ils virent, qui les observait de ses petits yeux perçants, tachetée de jaune, une salamandre. Elle surveillait leurs gestes et intervenait pour les guider en cas d’hésitation. Elle dansait de l'un à l'autre, avec grâce et légèreté.
Elle était là depuis le début, mais à ce moment là, leurs yeux étaient incapables de la voir...
Elle leur était reconnaissante d’avoir si bien nettoyé l’atelier du forgeron. En effet, cette salamandre là, toute salamandre qu’elle fût, amoureuse du feu, était allergique à la poussière !

Ils terminèrent leurs clés. Deux ans s’étaient écoulés depuis qu’ils étaient arrivés chez le forgeron. Ils le saluèrent avec beaucoup d’émotion en le remerciant pour tout cet apprentissage qui, même s’ils en avaient souffert, leur avait tant appris sur eux et sur la vie. Ils s’embrassèrent aussi, le cœur gros de devoir se séparer mais heureux et riches de tous ces instants partagés.
Les sorcières les attendaient. Les balais vrombissaient. Ils s’installèrent et le temps que met l’éclair pour atteindre la terre, ils se retrouvèrent, chacun devant la porte de bois massif, aux serrures ouvragées.

Benjamin mit chacune des clés dans la serrure qui convenait. En observant attentivement,  il vit une dernière serrure.

serrure2

Il était perplexe. Il n’avait que six clés…
Il tourna la première clé, puis la deuxième puis les suivantes.
Il tourna la poignée. Et bien qu’il n’eût pas mis de clé dans la septième serrure, la porte s’ouvrit…
Il comprit qu’il était devenu LA clé.

Sourire


Ce qu’il découvrit à l’intérieur de la maison de pierre n’appartient qu’à lui.
Il ne vous reste plus qu’à chercher votre maison de pierre et devenir vous même la clé pour connaître le trésor qu’elle recèle.

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